Que la Grèce gagne..

Que la Grèce gagne..

l’éditorial de PATRICK APEL-MULLER dans le journal l’humanité

La Grèce disait le malheur en Europe ; elle en clame aujourd’hui l’espérance. Broyé après le passage de la sinistre troïka composée du FMI, de la Banque mondiale et de la Commission européenne, rejeté des dizaines d’années en arrière par l’austérité, le pays aurait pu être voué à l’accablement ou égaré sous la férule des fascistes qui reparaissent sous Aube dorée. La résistance de ses forces vives et l’alternative proposée par Syriza sont en train de changer la donne. La droite a pu agiter la peur et désigner l’immigration comme un bouc émissaire, les hiérarques de Bruxelles défiler en rangs pour menacer les Hellènes des foudres de l’enfer libéral, Christine Lagarde promettre des mesures de rétorsion… rien ne semble y faire. L’avènement d’une force vraiment à gauche, balayant le Pasok et la droite, serait à coup sûr un soulagement pour une population meurtrie. Celle-ci sait qu’une rude pente est à remonter mais que Syriza a ce courage.
Mais un succès de cette gauche de transformation aurait aussi de formidables répercussions en Europe, lézardant un peu plus les politiques d’austérité, crédibilisant la relève à gauche d’une social-démocratie domestiquée par le marché, rejetant au rayon des vieilleries les rengaines thatchériennes entonnées par la droite. En Espagne, le mouvement Podemos secoue également le système et réclame une nouvelle politique de progrès démocratique et social. En France, les communistes et le Front de gauche, les écologistes, les socialistes frondeurs regardent le processus avec sympathie et entament des débats pour trouver les points d’accord sur lesquels appuyer une autre politique que celle, libérale, conduite par le tandem Hollande-Valls. Des Chantiers d’espoir sont ouverts, un pot commun d’idées, de controverses, d’échanges, des rencontres à travers la France où les citoyens auront enfin droit de cité. Qu’elle gagne, et la gauche grecque aura des alliés pour résister aux diktats ! Qu’elle gagne et les traqueurs de dépenses publiques, les réducteurs de pouvoir d’achat, les amoureux du CAC 40 auront moins de force pour faire la loi.

Michel Barrier